C’est un caractère qui nourrit la plupart de ses rôles et lui valut sur certains plateaux une réputation de «casse-couilles quatre étoiles»: Gene Hackman ne triche pas. Simple et direct. Même s’il vient à Cannes à reculons, pour la première fois en trente-cinq ans de carrière, qu’il n’a rien à gagner et rien à perdre. On lui pose une question. Il répond. Sans tourner autour du pot. Il a des regrets, il ne les escamote pas, à la différence de la quasi-totalité de ses pairs. Un moment vient même, à l’évocation de son peu d’éducation, où l’intensité de son regard se décharge d’un coup. «Je n’étais pas préparé à devenir un grand acteur classique. J’aurais tellement aimé, pourtant.»
Under Suspicion, le film qu’il est venu présenter (une adaptation de Garde à vue de Claude Miller), lui tient à cœur: il a mis des années à monter le projet. Il ne cherche pas pour autant à le défendre si on ne lui en fait pas la demande. Il y a pas mal de choses auxquelles Gene Hackman a renoncé depuis longtemps. Il avait annoncé au début des années 70 qu’il prendrait sa retraite dans les dix ans. «Je ne me vois pas finir en vieil acteur respectable», disait-il. Au lieu de quoi, il est resté sur la brèche, multipliant les rôles dont certains ne lui apportaient rien. «Je ne m’arrête jamais de travailler parce que j’ai toujours peur que la bulle disparaisse», disait-il au milieu des années 90. La grande leçon de cet autodidacte, c’est qu’au fond, on n’apprend pa