La grande ambition de James Gray est de ne pas décevoir. Depuis la
sortie de Little Odessa, cette pensée ne l'a pas quitté. En juin 1995, alors que son premier film était encore à l'affiche, le jeune cinéaste du Queens s'est attelé à l'écriture de The Yards et n'en a pas démordu malgré l'excitation qui prenait autour de son nom. Selon ses voeux, le film arrive à Cannes en grande pompe, en point d'orgue de la compétition. A deux jours de la projection, l'angoisse de ne pas être à la hauteur de l'attente est si flagrante qu'on voudrait parfois lui dire que tout se passera bien. A plusieurs reprises, autour d'un café qui refroidit, la conversation est interrompue par une politesse inquiète («Est-ce que je me fais bien comprendre? J'ai l'impression de vous ennuyer"»). «Quasi obsessionnel». Le doute, bien sûr, est à double tranchant. Si James Gray ne s'est jamais laissé distraire de son projet initial, c'est qu'il croit dur comme fer à son entreprise de cinéaste. Il n'a d'ailleurs besoin de personne pour le rassurer. Ou presque: «Pour Little Odessa, j'avais dû batailler pour parvenir à mes fins et je n'étais pas totalement satisfait du résultat. Cette fois-ci, je n'ai manqué ni de temps ni d'argent. Je pense sincèrement que, dans un registre identique, The Yards est meilleur, j'ai le sentiment d'avoir fait exactement le film que j'imaginais. Peut-être l'aimera-t-on moins pour ça"» Dans les entretiens qui ont suivi Little Odessa, le New-Yorkais épris de Zola et de pensée contest