C'est dans les petits cabarets et bistrots du Munich populaire du
début du siècle dernier, que Karl Valentin (1) aimait particulièrement se produire. Même quand il était à l'affiche des grands théâtres, c'est toujours dans ces ambiances bruyantes et enfumées, dans le brouhaha des petites gens attablés autour de saucisses et de bières que l'homme de scène «une des figures intellectuelles les plus pénétrantes de l'époque», selon Brecht trouvait l'inspiration de sketches comme le Bastringue. Daniel Martin et Charles Tordjman y ont puisé la matière d'un spectacle réjouissant, qu'ils trimballent de ville en ville dans une baraque ambulante où l'on peut boire et manger. Logé sous le couvert des arbres qui bordent le théâtre de la Commune à Aubervilliers, pour ce samedi soir encore, le Bastringue à la gaieté théâtre s'ouvre sur les chamailleries et ratages d'un orchestre de banlieue vieillot.
Trouble-fête. Tous les trucs sont bons, dans la grande tradition du music-hall forain: le chef d'orchestre tyrannique, le trompettiste campé sur son étroitesse syndicale qui refuse de jouer une note de plus, le saxophoniste pris de quinte de toux, les critiques intempestives et les couacs en série, la violoniste qui a oublié son violon et le rideau de scène qui coince toujours au moment critique. Seule variante à la pièce, le rôle du perpétuel trouble-fête attribué par Karl Valentin à lui-même, est ici partagé entre les huit interprètes. Costumes défraîchis, noeud pap' de traviole et perruqu