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Libération
Critique

Scène de vie domestique

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publié le 24 juin 2000 à 1h47

Comment disent-ils déjà? Ah oui: "une esthétique combative". Le terme n'est pas excessif lorsque l'on voit la machine de guerre déployée par les Catalans de Carles Santos pour magnifier ce qui ne sont, après tout, que des souvenirs d'enfance, où chacun reconnaîtra les siens. Exemple: "Hier, dans la nuit, mon fils avait un peu de fièvre; mais, ce matin, je l'ai envoyé à l'école." Evidemment, ces propos ont une autre gueule en latin, même de cuisine: "Heri nocte, filius mei decimas habebat, sed hodie mane eum misi in scholam." Qui plus est quand ils sortent, surlignés de coups de tonnerre symphoniques, des coffres de stentor de ténors et de divas dézingués dans une dramaturgie digne du ring de Bayreuth. Un ring qui tient ici autant de l'art lyrique que de la boxe, tant les décibels et la mise en scène enchaînent crochets et uppercuts sur les rétines et les tympans.

Borborygmes et bel canto. En guise d'ouverture, une scène noire que viennent emplir quelques crucifix et les torrents furieux d'un orchestre philharmonique passé au synthétiseur. Gros plans, éclairés à la verticale, l'un effaçant l'autre, de chaque protagoniste. Chacun y va de son aria. Vocalises emplies de cette émotion boursouflée qui fit se pâmer des générations d' évaporées dans les loges de la Fenice ou de la Scala. A ce détail près que quelques gargarismes et borborygmes viennent subrepticement se mêler à l'art du bel canto.

Passons à l'entrée. Un bouquet de crevettes roses descend des cintres pour servir de toi