Quel rapport continuons-nous d'entretenir avec la campagne et le monde paysan dès lors que l'on vit dans une grande ville et que l'on est sociologiquement intégré au secteur tertiaire? A peu de choses près, entre fromage fermier et vacances en gîte rural, ce rapport se construit désormais autour d'un idéal bio et d'un souci écologique de préservation de la nature. L'idée de santé, d'équilibre, d'une forme de pureté aussi, traverse notre conception de la campagne comme ultime espace préservé de l'inauthenticité de la technique et de l'urbanisation.
Vaches folles. Il ne s'agit évidemment que d'alibis dans une course effrénée vers une technicité toujours plus grande; les récentes affaires de vaches folles ou de produits génétiquement modifiés ont du moins eu le mérite de nous rappeler que l'agriculture n'a pas échappé à tous les processus, y compris les plus violents, de la modernisation. Les Terriens, le film documentaire d'Ariane Doublet, venant après A la campagne de Manuel Poirier ou plus récemment C'est quoi la vie? de François Dupeyron (mais on pourrait aussi citer les films de Kiarostami ou A Straight Story de Lynch), reprend ce thème et ces questions en leur conférant une dimension d'étrange crépuscule. Il faut dire que la réalisatrice a décidé de filmer avec sa caméra vidéo les habitants de Vattetot-sur-Mer, dans le Pays de Caux, avant et pendant l'éclipse totale du soleil, en août 1999. Cet événement d'ordre cosmique mis en perspective avec le quotidien minuscule des g