La scène était à ses yeux l'endroit le plus doux et le plus protecteur. Il semblait à Gassman plus naturel d'être sur les planches d'un théâtre que dans son salon. As du vrai mentir aux longues mains vigoureuses, il ajoutait en blaguant qu'à sa mort il se verrait bien empaillé dans son living-room, avec une bande magnétique à l'intérieur de sa dépouille pour continuer à dévider ses blagues. Peut-être seraient revenues ainsi les paroles de ses auteurs favoris, à commencer par Shakespeare, avec lequel son talent explosa en 1952, lorsqu'il joua Hamlet à la tête du Teatro d'arte italiano, troupe qu'il avait fondée. Succès pour le jeune premier qui avait débuté, en 1943, à Milan, au sortir de l'Académie d'art dramatique. Jamais Gassman n'abandonna le théâtre. Encore début 1999, à Gênes, à Palerme, à Rome et à Buenos Aires, le mattatore italien subjuguait des foules dans un récital d'adieux: un survol de cinquante-six ans d'une carrière au fil de laquelle il avait été oedipe-Roi, Kean ou le héros idoine d'Un tramway nommé désir, sans parler d'Othello, rôle qu'il reprit à différentes saisons de sa vie. L'année de ses 70 ans, les spectateurs parisiens furent gratifiés au théâtre des Champs-Elysées d'une version réduite d'Ulysse et la baleine blanche, où Gassman en capitaine à la barbe blanche mêlait à son adaptation de Moby Dick des vers de Dante. Le spectacle avait d'abord été monté dans un décor géant de bateau, signé Renzo Piano, dans les studios de Cinecitta. Les spectateurs ent
Gassman fidèle à la scène
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publié le 30 juin 2000 à 1h59
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