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Libération
Critique

""Destinees"" bien senties

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Olivier Assayas adapte la saga provinciale de Chardonne.
publié le 12 juillet 2000 à 3h02

Au commencement, la mort est générique: nous sommes au cimetière, pour une cérémonie des adieux protestante, et c'est le pasteur Jean Barnery qui officie. Dans les scènes qui vont suivre, il va quitter son épouse Nathalie, renoncer à leur enfant, à sa vocation religieuse et à sa fortune. Puis, avec Pauline, il va tout recommencer, rebâtir un amour unique et majestueux, refaire un enfant, reprendre l'entreprise familiale de porcelaine et traverser le premier morceau du siècle, entre faillites et épouvantes. Trente ans plus tard et trois heures plus loin, l'amour intact de Pauline et Jean brûle ses derniers feux de vie. Nous revoilà à l'origine, puisqu'à la fin, la mort est aussi conclusive.

Double optique. Malgré ce goût de cadavre prégnant auquel nous devrons tous nous habituer, et qui n'est d'ailleurs pas forcément désagréable, les Destinées sentimentales est une saga toute en sagesse, l'épopée placide d'un amour si fou qu'il croise sereinement à la surface d'une mer sociale homérique et glisse presque paisiblement sur l'océan démonté de l'histoire de France. C'était le cas du livre de Jacques Chardonne et c'est tout à fait vrai du film, qui maintient en permanence, sur un même front, cette double optique puissante, cette superposition du temps réel et commun à tous mais avec lequel on n'a jamais le sentiment de vraiment coïncider, et l'autre temps, celui dans lequel s'inscrivent et évoluent les individus, les amants, les morts, les souvenirs.

Le sablier du film est donc sa m