C'est à Moscou, dans un pâté de maisons vert d'eau, que se niche le Théâtre Helikon qui, depuis plus de dix ans, en fait voir de toutes les couleurs à l'opéra russe. A sa tête, Dmitri Bertman, qui connaît la musique. Ses mises en scène olé-olé, de Carmen par exemple, ont assis sa réputation à l'étranger, mais quelle est donc la place locale du Helikon? L'établissement, qui comptait cinq solistes au départ, est fort aujourd'hui de 300 artistes et techniciens. Il a suscité une vague d'imitateurs dans ce qu'on pourrait appeler l'opéra de proximité: entre la scène et la salle, entre l'opéra et la vie. Faut-il préciser que pour Bertman, le Bolchoï est l'antimodèle?
Ruche. Dans la mouvance de la perestroïka, le jeune homme qu'il était il y a quinze ans, n'a pas eu à pousser loin pour se dire qu'il fallait inventer des formes nouvelles. «La Russie est pleine d'artistes qui sortent du conservatoire sans savoir pourquoi ils chantent, de théâtres où le public va comme au cimetière. On a voulu regarder l'opéra autrement: du côté de la vie.» C'est ce qui frappe dans l'Helikon: son côté ruche, sa complicité avec le public. Une sorte de baloche du samedi soir avec orchestre classique, choeur, solistes et air(s) du temps. «Le public vient se distraire, rire, pleurer, réagir; seul le théâtre lyrique peut offrir ça.» Bertman s'adresse à ce spectateur urbain idéal qui vit à l'heure du vidéo-clip, digérant «cent images à la minute tout en écoutant une chanson plus ou moins idiote».
Ce qui fait l