Elle habite en haut d'une tour: murs blancs et vue sur la Seine. Il squatte à la campagne dans la caverne d'Ali Baba familiale: vinyles du père et chandeliers chinés par la mère. Andrée et Matthieu Chedid se voient rarement, «de plus en plus souvent pour des photos». Comme si, à force de n'entendre parler que de famille décomposée-recomposée, on venait se ressourcer auprès de cet improbable duo, comprendre ce qui resserre le fossé des générations. Sur une rive, le petit-fils qui ne dit pas «mamie» mais «Andrée» ou «Mamoutch», sur l'autre la grand-mère qui lui a «toujours parlé comme à un adulte de choses "philosophiques", tout le contraire d'une mamie gâteau». Et au milieu coule l'amour? Le cliché les fait sourire.
Des photos, il y en a de toutes les générations sur la bibliothèque d'Andrée. «C'est mon fils Louis et mon père, vous ne trouvez pas la ressemblance frappante?» Même regard rêveur, mêmes moustaches ironiques. «Aujourd'hui, je me dis que mon père pourrait être mon fils.» Etrange convergence du temps.
Matthieu, lui, a effacé les moustaches et le nom Chedid, pour ne garder qu'une fossette sur la joue gauche et des sourcils circonflexes. «Au départ c'était totalement gratuit. Je me suis mis devant la glace et j'ai essayé de me faire une coupe en M. Je voulais sortir du quotidien, me mettre encore plus en avant.» Crise d'adolescence tardive, rejet de l'atavisme familial. Matthieu le timide troque l'étiquette de «fils à papa» contre un M sur son tee-shirt. Enfant, il rêva