Benoit Jacquot tourne à plein régime. C’est comme si le plus scintillant des rescapés parmi les héritiers de la Nouvelle Vague (génération Akerman-Garrel, entre autres), le pied à fond sur le champignon, avait décidé de ne plus descendre du manège enchanté où le cinéma l’a fait monter in extremis. Il filme comme il respire, lâche à peine le volant entre les tournages et voit sans trembler l’aiguille rougir au compteur de sa filmo: pour lui, l’après-Sade a déjà commencé avec une Tosca pour Toscan du Plantier et les premières ébauches d’un Barrage contre le Pacifique, en hommage à son amie Marguerite Duras.
Cette période de jouissance créative continue a fait grand bien à son cinéma, permettant à Jacquot de devenir, en quelques années, l'un des rares auteurs français, avec André Téchiné par exemple, à conjuguer avec élégance les servitudes du système et une marge d'autonomie personnelle, invulnérable et permanente. C'est d'ailleurs cette situation heureuse et presque inespérée, cette carrière emballée et pourtant sur le fil, qui donne à son cinéma son double fond épicurien, parfois très ironique et souvent cruel.
Convaincante. Sade, par la force des choses, n’échappe pas à cette règle. Curieux mélange de modestie et d’orgueil, le film s’attache à concentrer dans un espace très restreint (la «clinique» de Picpus) et sur un temps très court (quelques semaines de l’année 1794) une histoire copieuse et convaincante: comment, alors que la Terreur atteint son horrifique apogée,