En 1950, quand Cesare Pavese reçoit le prix Strega pour le Bel été, il a quarante et un ans. C'est une plume confirmée. Dans l'Italie d'après-guerre, qui ne connaît son oeuvre romanesque et poétique (Avant que le coq chante, Travailler fatigue)? On lui doit également des traductions d'auteurs anglo-saxons, américains en particulier (Moby Dick de Melville, le 42e parallèle de Dos Passos) et la création d'une collection «Etudes religieuses, ethnologiques et psychologiques» chez Einaudi. Et bien sûr, des articles et des essais de Littérature et Société. C'est l'été à Turin, Pavese se prépare à passer le dimanche à la campagne, comme d'habitude. Sa soeur lui fait sa valise. On est le 26 août 1950, samedi. Mais Pavese ne part pas. Il prend une chambre à l'hôtel Roma de Turin, en face de la gare, et n'ira pas plus loin. Le 27, on le retrouve mort: seize cachets de somnifère.
«Vice absurde». Qu'est-ce qui motiva un tel acte? Chagrin d'amour? Un de plus. Impuissance... L'actrice américaine Constance Dowling à qui il a dédié le poème la Mort viendra et elle aura tes yeux est repartie outre-Atlantique. Une responsabilité politique trop lourde à assumer? Le Parti communiste italien dont il était membre depuis 1945 n'a pas renouvelé sa carte. On lui reproche sa fascination pour les mythes, une vision anhistorique de l'homme peu conforme avec l'évangile du réalisme socialiste. De toute manière, «une bonne raison de se tuer ne manque jamais à personne», comme il l'écrit en 1938 dans son jo