Montée à Bonn puis présentée à Ottawa, la rétrospective Philip Guston débarque aujourd'hui à Paris. Bien qu'originaire de Montréal (il y est né en 1912), le dernier enfant de la famille Goldstein quitte le Canada pour Los Angeles dès l'âge de 6 ans. Toute sa vie se déroulera aux Etats-Unis et c'est à New York qu'il succombe d'un infarctus en 1980. Drôle de zigue que ce fils d'anciens émigrés russes, amateur de bandes dessinées et admirateur de Piero della Francesca. Condisciple de Jackson Pollock, proche des muralistes mexicains, figuratif marxisant jusqu'au seuil des années 50, membre de l'école de New York, ami des musiciens John Cage et Morton Feldman, il retourne à la figuration militante au moment de la guerre du Viêt-nam, pour finir par peindre des objets idiosyncrasiques parmi lesquels prédominent la semelle cloutée, la cigarette, le pinceau, l'index pointé, le livre et la cagoule du Ku Klux Klan.
Sincère. Guston paraît avancer à cloche-pied. Quand il se lance dans l'abstraction, il développe une peinture atmosphérique proche du flou «artistique» des compositions impressionnistes. Lorsqu'il systématise cette abstraction, il lui donne un tour européen, avec un découpage en «carreaux» très mondrianesque. Au moment où il revient au système représentatif de ses débuts, il semble renier l'expressionnisme abstrait dont il était l'un des hérauts, tout en se démarquant du pop art naissant. Et le jour où personnages et objets ordinaires deviennent ses sources explicites d'inspi