Cent quarante clichés originaux, parmi les 400 000 entreposés au Fonds photographique du Quai d'Orsay (lire page suivante), sont aujourd'hui exposés dans un lieu ordonné par Louis XIV et habité par l'esprit de Napoléon Ier, les Invalides. Là est d'ailleurs la magie de Regards sur le monde, l'entrée en zone stratégique tout près, le musée de l'Armée , puis la découverte dans une salle aux couleurs harmonieuses d'un trésor patrimonial. Trésor est le mot qui convient tant notre histoire, jadis apprise dans les manuels scolaires, s'enrichit soudain de ce face-à-face avec des milliers de visages inconnus. Tous morts et désormais défigurés, capturés par des consuls, des amateurs ou des professionnels renommés, afin de rendre compte à leurs supérieurs des agitations d'un monde aux contours mouvants.
Toute photographie est à double tranchant, chacun le sait depuis Nadar (1), mais personne n'imaginait, au temps où Zola écrivait et Manet peignait, combien l'expansion territoriale française était diplomatico-photographique. Développant la politique amorcée par Napoléon III et son Second Empire, la IIIe République lancera, elle aussi, ses consuls à la conquête des marchés d'Amérique latine, de Chine ou de l'empire ottoman, invitant «la machine diplomatique» (2) à poursuivre, en même temps que les correspondances confidentielles, l'art de la mise en boîte.
Nous voici donc, à notre tour, conviés à la visite d'une planète inventoriée avec prudence chère diplomatie! , mais avec une fraî