L'ignoble Shemr lève son bras au bout duquel brille une longue lame. Il va décapiter l'imam Hossein, le fils d'Ali, cousin et gendre du prophète Mahommet. La foule iranienne, femmes voilées d'un côté, hommes de l'autre, revit cette scène fondatrice de l'islam chiite, réitérant le drame historique qui se déroula en octobre 680 au dixième jour du mois du Moharram dans la plaine de Kerbala (aujourd'hui en Irak) : le meurtre de l'héritier direct du prophète par les hommes de main d'Ibn Saad, le chef des armées du calife de Damas (appartenant au camp majoritaire des sunnites, ceux qui, à la mort du prophète, jugèrent que les disciples aussi pouvaient revendiquer la succession). Mais, soudain, l'Iranien chiite qui porte les habits rouges de Shemr et dit le texte échu à ce dernier au centre du tékieh (sorte d'arène) suspend son geste, prend à témoin l'assistance (des centaines, des milliers de chiites, selon les lieux), et, en pleurs, (larmes réelles), demande pardon pour l'acte qu'il va accomplir. Puis il passe à l'acte. La tête décapitée d'Hossein est fichée au bout d'une pique au milieu des lamentations de l'assistance.
Foi et unité
Cette scène est l'un des points culminants du tazieh (ta'ziat veut dire deuil en arabe) qui, pour un Occidental, apparaît comme un spectacle fascinant mais pour les chiites représente bien plus que cela. Chaque année, dix jours durant quand revient le mois du Moharram, dans bien des villes et villages, l'Iran du XXIe siècle vit à l'heure du tazieh, que