Précédé d'une grosse rumeur lors du dernier Festival de Cannes (où il remporta finalement le prix du Jury, ex-aequo avec le Tableau noir), Chansons du deuxième étage n'est pourtant pas parvenu à soulever la vague de stupeur et d'enthousiasme délirant que d'aucuns avaient un peu hâtivement prophétisée. Il faut dire que ce film réalisé par un cinéaste suédois qui s'est surtout illustré dans la publicité (quelque 300 spots à son actif, un bon nombre couronnés de prix) se présente sous la forme d'un morne requiem assourdi pour un monde agonisant, quelque chose comme le Brazil de Terry Gilliam évidé de son baroquisme, cuit et recuit à l'étuvée kafkaïo-becketienne pour finir par couler en jus d'endive et eau de boudin. Donc, pas de quoi galvaniser les foules, même si ce film est aussi de ceux dont on fait le plus naturellement les cultes, et les jolis posters pour ados cinéphiles.
Andersson est parvenu à obtenir avec l'argent de ses pubs une complète autonomie créatrice au sein de sa boîte, Studio 24, installée à Stockholm, et il se vit comme un rebelle à l'establishment suédois, qui ne l'aurait en rien aidé à monter son grand oeuvre. L'obstination maniaque qui préside à la composition des plans, renvoyant davantage à l'univers des planches de la bande dessinée qu'à celui des tableaux de l'expressionnisme allemand Otto Dix, Max Beckman dont le cinéaste se réclame, sert de piédestal à un humour particulièrement sombre et millénariste.
Obèse en fil rouge. Andersson suit plusieurs