Contrairement à ce que son titre pourrait suggérer, la rivière Suzhou n'est pas un fleuve de rêve mais un égout à ciel ouvert qui charrie la crème des pollutions urbaines jusqu'au centre de Shanghai avant de se jeter dans la rivière Huang-pu. Cela dit, pour désamorcer les amateurs d'orientalisme touristique. La bonne idée du jeune (35 ans) cinéaste Lou Ye, c'est qu'il métaphorise comme un fou sur cette rivière de merde. C'est-à-dire qu'il charrie lui aussi, mais un certain type de déchets humains incarnés par un voyeur amateur (vidéaste ambulant et narrateur en chef), une jolie jeune fille aux bras constamment croisés, et bientôt, par un transfert d'identité magique (je est un autre) un coursier en motocyclette.
Démarré sur le mode du journal intime et dépressif, Suzhou River accélère dans la chronique de la délinquance ordinaire. Trafic de putes, petites arnaques et kidnapping. Comme dans un film de Cocteau, Mardar, le coursier motard, est surtout le messager de la mort. Quasi baby-sitter de l'adolescente Moudan (la charmante Zhou Xun), quand son père maquereau se tape une pute, et finalement complice d'un enlèvement mafieux qui sera fatal à son amour pour la jeune fille en couettes, celle-ci préférant se jeter dans la rivière Suzhou que de conclure avec son jeune adorateur.
Mensonges. Quelques années plus tard, Mardar sort de taule et croit reconnaître Moudan dans un bar, reconvertie en sirène d'aquarium à perruque blonde sous le nom de scène de Meimei. Imbroglio donc. Car r