Qualifié cet été par Amy Taubin dans le Village Voice, et non sans une certaine perspicacité, de «film le plus idiot de la saison», The Cell atteint indéniablement des degrés inouïs de tambouille-barbouillage assumé, solidifié sous nos yeux en thriller-croûte numérique, retour de flamme de cyber-Chef-d'oeuvre inconnu à faire se dresser les derniers cheveux qui restent sur la tête des derniers cinéphiles. Rien que pour ça, cette chienlit esthétique ouvrant sur l'ère du cinéma révolu, au profit d'on ne sait encore quelle simulation spectaculaire virtualisante, The Cell est tout à fait épatant de mauvais goût, de perspicacité visionnaire et d'aplomb pur et simple.
Ingénieusement placé sous le signe de la «fêlure de Whale», atteinte virale descellant l'esprit de lui-même et du corps, plongeant le malade schizophrène dans un «rêve sans fin», The Cell reprend les choses là où Matrix ou Fight Club les avaient laissées, tout un ensemble de fabulations d'époque sur la contagion des simulacres dévorant de proche en proche la réalité, le sentiment paranoïaque que tout est fiction et qu'il n'y a plus d'issue, la perte d'identité des individus livrés aux affres d'un monde dématérialisé.
Recyclage. Le cinéma américain, une fois de plus placé aux avant-postes, s'étourdit depuis quelque temps de cette thématique que d'ailleurs reprennent et affinent aussi dans la fournaise de la langue des écrivains essentiels tel William T. Vollman (Récits en arc-en-ciel) ou Denis Johnson (Déjà mort) (1).