Douze ans séparent Julie Is Her Name, son premier 33 tours à la pochette provocante («dévoilant de manière non équivoque les épaules d'une femme mûre séduisante, ce qui rompt radicalement avec les teenagers anorexiques de l'univers rock», écrira à l'époque de sa commercialisation le critique Donald Clarke), d'Easy Does It, son dernier enregistrement. Douze ans (1955-1967) pendant lesquels Julie London a publié la bagatelle de trente-deux albums, tous placés sous le signe d'une manière d'intimisme musical souligné par sa voix («mon filet de voix», aimait-elle à souligner) suggestive, sans filtre, qu'on devinait collée au microphone dans un quelconque studio tamisé. D'où la sensualité émanant de ses interprétations minimalistes (s'appuyant souvent sur la seule guitare de Barney Kessel ou sur la fausse rigueur d'un trio West Coast), chères à quelques héros littéraires à la moralité douteuse. Témoin, le jovial Al Wheeler, sergent mélomane de Carter Brown, dans la discothèque suréquipée duquel Julie London figurait en bonne place et en bonne compagnie, puisqu'entre Frank Sinatra, Dinah Shore et Peggy Lee.
Préretraite. En 1981, d'ailleurs, un autre flic d'opérette, Burt Reynolds, fera appel à la chanteuse alors en préretraite, afin qu'elle intervienne sur la BO du film qu'il envisage de réaliser, Sharky's Machine, avec Vittorio Gassmann dans le rôle du saligaud importé. Julie London gravera ainsi, à la demande de l'ancien cascadeur, un codicille phonographique: My Funny Valentine,