San Francisco envoyé spécial
«Dans les années 60, juste avant l'arrivée des hippies, il y a eu à San Francisco une floraison intellectuelle exceptionnelle. Tout s'y prêtait, la tradition artistique et littéraire de la ville, le coût de la vie très bas et la qualité de cette vie très haute. C'est à cette époque que des troupes de théâtre radicales ont vu le jour, que Richard Brautigan et de nombreux écrivains sont venus. Depuis, la ville vit sur cette réputation.» Si le romancier Thomas Sanchez, auteur de Rabbit Boss et de Kilomètre zéro, se souvient du temps jadis, c'est pour aussitôt faire la comparaison. «Aujourd'hui, les loyers ont tellement augmenté qu'aucun artiste ne peut suivre. Il y a un très bel immeuble, une sorte de Chrysler building local, où les loyers ont été multipliés par près de vingt juste pour virer tous ses habitants et mettre à la place ceux de la Silicon Valley. Parallèlement, de nombreuses excellentes librairies ont disparu.»
Embourgeoisement. Des librairies mais aussi des troupes de théâtre. Et des dizaines de plasticiens, d'écrivains, de musiciens, de danseurs... sont partis sous d'autres cieux. Les souvenirs de la bohème, de Jack Kerouac et de Jack London, de Tina Modotti et de Dashiell Hammett, de Janis Joplin et de Mark Twain, appartiennent à la préhistoire. Que faire quand le slogan de l'agent immobilier moyen est: «à louer à celui qui fera la meilleure offre», et que la surenchère ne connaît pas de limites? Que faire quand les champions de la nouv