Taj Mahal
en concert à la Cigale ce soir.
Discographie blues: à signaler «Señor Blues».
Dans les années 20, un personnage de l'écrivain Claude McKay clamait: «Le banjo, c'est l'esclavage. C'est l'instrument des négriers [...] Jouons du piano et du violon, de la harpe et de la flûte, et laissons le banjo aux Blancs s'ils veulent se souvenir des bons Nègres chantants et de l'enfer qu'ils leur faisaient vivre...» La guitare n'avait pas meilleure presse: «Vous dites bien/Un banjo/Non monsieur/Vous saurez qu'on ne souffre chez nous/Ni ban/Ni jo/Ni gui/Ni tare» (Leon-Gontran Damas). Lorsque Taj Mahal débarque, au milieu des années 60, cette manière de penser a fait son chemin; les Noirs viennent enfin de découvrir la recette d'une musique parfumée, pailletée, qu'achètent les Blancs. Ce n'est vraiment pas le moment de leur remettre le nez dans les odeurs de cuisine du Dixie. Taj Mahal, lui, se décline comme un menu: épices, whisky, même une truite qui mijote dans un coin (Fishin' Blues). Souvent, lui-même décrit son approche en termes culinaires: «Quand je flaire quelque chose de différent, je le traque jusqu'à le débusquer et je le ramène à la maison pour mon dîner.»
Si le nez de Taj l'a conduit sur la piste du Grand Sud à l'époque où les Noirs s'en étaient détournés, c'est qu'il a une autre histoire que celle des chanteurs de soul. Ses ancêtres viennent de la Caraïbe, ils sont ces «chasseurs de singes» qui refusaient de lâcher leur banjo du temps de McKay et qui, depuis, ont eu l'occ