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Libération
Critique

S'engouffrer dans «la brèche».

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Les frères Larrieu ont tourné leur nouveau film en montagne et aux confins du cinéma.
publié le 15 novembre 2000 à 6h34

La Brèche de Roland d'Arnaud et de Jean-Marie Larrieu, avec Mathieu Amalric, Cécile Reigher, Julien Rivière, Anaïs Chunleau... 47 min.

Arnaud et Jean-Marie Larrieu ne font du cinéma comme personne. Aventuriers, communautaires et malicieux, leurs films sont des objets définitivement rétifs à la critique, à la promo ou à quelque formatage que ce soit. Voyez la durée de leur dernière blague, la Brèche de Roland: 47 minutes, de qui se moque-t-on? De nous, bien sûr. De nos conditionnements successifs. De nos exigences naïves en matière de scénario et d'histoire bien tempérée. De nos attentes prédéfinies, de notre accoutumance à ce psychologisme qui encombre trop souvent le cinéma français.

Caillou. Résolument atypiques et fermement inclassables, les frères Larrieu appartiennent de plain-pied à la contre-histoire du cinéma français, cette marge où, depuis au moins la nouvelle vague, s'est tourné le scénario du cinéma moderne à son meilleur. Mais le processus est connu, qui veut que la marge, à force d'insistance, rejoigne le centre et génère à son tour une marge de la marge, caillou de caillou, dont les Larrieu sont parmi les plus estimables Poucets. A la limite, cette marge au carré, les Larrieu n'ont même pas eu besoin de la choisir: ils y ont été joyeusement poussés; ils en ont simplement décidé la géographie, la plus lumineuse et déshabillée possible.

Car cette fois, face à la Brèche de Roland, le spectateur a toutes les chances de se sentir à poil, vertigineusement lâché dans un