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Libération
Critique

Les pensées des moutons.

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publié le 29 novembre 2000 à 7h13

Le Gardeur de troupeau

de Fernando Pessoa (Alberto Caeiro), m.s. d'Hervé Pierre au Théâtre national de Strasbourg jusqu'au 2/12 (03 88 24 88 24), le 8/12 au Fanal-Théâtre Gérard-Philipe,

Saint-Nazaire (03 40 22 70 93) et les 19 et 20/12 au théâtre de Cavaillon (04 90 78 64 64).

«Je suis un gardeur de troupeaux. Le troupeau, ce sont mes pensées/ Et mes pensées sont toutes sensations./ Je pense avec les yeux et avec les oreilles/ Et avec les mains et les pieds/ Et avec le nez et la bouche», écrivait le Lisboète Fernando Pessoa dont le nom signifie «personne» au sens de «quelqu'un» dans sa langue natale, et qui à chaque nouvelle oeuvre s'inventait une autre identité. Parmi ces hétéronymes, ces voix intérieures qui peuplaient son petit théâtre imaginaire, le poète Alberto Caeiro, qui signe le Gardeur de troupeaux, est sans doute le plus allègre.

Exploration du vide. Rythmé en quarante-neuf pensées éparses (chacune est un mouton qui s'écarte du rang), le Gardeur de troupeaux contient déjà en germe le Livre de l'intranquillité et le Faust. La nature et l'essence de la pensée, l'exploration du vide sont déjà au coeur de l'écriture. Cette quête de l'insaisissable s'opère ici dans le plus grand dépouillement littéraire, avec douceur et simplicité, dans une véritable mise à nu des idées et des émotions.

L'atmosphère, sur le plateau étroit sobrement conçu par Daniel Jeanneteau, invite à la veillée. Vêtue d'une tunique de gros coton blanc et coiffée d'une couronne de branches, Clothilde Moll