Les messes du brechtisme étant dites, les brechteux se faisant vieux, l'heure est exacte pour lire Bertolt Brecht, le beau BB. Sans relents, sans écran, sans fard. Dans le mouvement même de sa vie, de ses écrits. Une parole jamais en place, souvent batailleuse, volontiers séductrice. Bref, la parution en Pléiade de tous ses Ecrits sur le théâtre dans leur ordonnance chronologique constitue du papier bible à l'usage des jeu nes générations.
Nouvelles traductions. Un livre considérable: 1 552 pa ges, notes comprises, traductions nouvelles (celles des nombreux inédits) et commentaires dus à une fine équipe emmenée par Jean-Marie Valentin: Bernard Banoun, Jean-Louis Besson, André Combes, Jeanne Lorang, Francine Maier-Schaeffer et Marielle Silhouette.
On peut l'ouvrir au hasard et y saisir en plein vol une pensée rafraîchissante comme ce bidon d'eau indispensable aux coureurs de marathon. Ainsi page 966: «L'erreur est complète quand les théâtres professionnels se ferment au théâtre amateur des travailleurs. Et l'erreur est complète quand le théâtre amateur se ferme au théâtre professionnel.» Ou, page 799, ce court dialogue: « Que fait le comédien de l'ancienne école? Il s'exprime, c'est tout. Et cette expression, il la vend comme une marchandise. A qui? Cet histrion, qui ne montre que les émotions que lui procurent certains événements inventés, a comme spectateur ce collectionneur d'impressions qui, pour sa part, n'enregistre que les sentiments que lui procure ce spectacle.»