Un célèbre chanteur appartenant à la communauté juive distingué par un prix qui porte le nom d'un éditeur de chansons pétainistes durant l'Occupation: c'est ce qui vient d'arriver à Patrick Bruel, lauréat en juin dernier du prix Rolf-Marbot. Un prix décerné dans le cadre du «printemps de la Sacem» et qui n'améliore pas la réputation de la vénérable société d'auteurs concernant la période de la collaboration. Accusée depuis deux ans d'avoir contribué sous l'Occupation à spolier les auteurs compositeurs juifs, la voilà aujourd'hui rattrapée par une autre affaire guère plus reluisante: les noms de personnalités de la profession musicale choisis chaque année pour les prix qu'elle décerne ici et là.
Rolf Marbot était un éditeur qui joua un rôle essentiel au sein de la Sacem et de la SDRM après la guerre et qui fut le patron des célèbres éditions Semi Méridian. Or, divers documents de l'époque de la collaboration, apparus ces derniers mois, le désignent comme l'éditeur de l'hymne pétainiste Maréchal nous voilà. L'affaire pourrait presque prêter à rire: pour l'année 2000, le prix Rolf-Marbot a été attribué à Patrick Bruel pour sa chanson J'te mentirais...
Flou. L'histoire de Maréchal nous voilà s'est jouée entre 1940 et 1944, au 95, rue La Boétie dans le VIIIe arrondissement parisien. D'origine allemande, Rolf Marbot (de son vrai nom Albrecht Marcuse) dirigeait à l'époque les éditions du Ver luisant, éditrices de la chanson, ainsi que d'autres à la gloire du Maréchal, comme la France