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Libération
Interview

«Jusqu'à douze heures par jour»

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En 1993, Balthus commentait sa méthode, sa technique...
publié le 19 février 2001 à 22h59

Vers la fin de l'été 1993, nous rencontrions le peintre, alors âgé de 85 ans, retiré dans sa grange-atelier aux cent fenêtres de Rossinière, en Suisse, où il nous parlait de ce qu'il n'aimait pas exposer: sa peinture.

Vous travaillez toujours très lentement...

Oui, parce que je recommence éternellement. C'est le côté aléatoire de la peinture. Car au fond, on ne connaît pas le métier. Pour faire ma peinture, il m'a fallu et il me faut encore chaque fois tout réinventer. Et les réinventions sont toujours hasardeuses. C'est un peu comme un écrivain qui n'aurait jamais fait de grammaire, qui manquerait de vocabulaire.

Même avec l'expérience?

On finit par en acquérir une, mais, une fois au travail, on ne sait jamais ce qu'il va advenir. Je ne peux donc pas m'en servir. J'en tiens pour preuve le dernier tableau que j'ai peint, avec lequel il m'est arrivé tellement d'accidents. Après deux ans de travail, il s'est mis un jour à peler comme une orange, ou comme une mandarine, plutôt. En fait, le fond était trop gras. Et gras sur gras, en peinture, ça ne marche pas. Il m'a ainsi fallu tout recommencer. Et finalement, ça a été bénéfique, car j'ai dû tout remanier. La petite fille qui m'avait servi de modèle, et qui est la fille de mon médecin, est en effet revenue habillée différemment, avec des vêtements très colorés. J'ai trouvé ça très bien et ça m'a conduit à changer les couleurs du tableau. Après ce pelage, j'ai aussi découvert cette composition en spirale, avec un mouvement ascension