Bamako envoyée spéciale
«Est-ce que le monde s'intéresse à la littérature africaine?» A cette question d'un élève du lycée du Progrès, à Bamako, les romanciers Abasse Ndione et Mandé Alpha Diarra répondent d'une seule voix: «Wole Soyinka a reçu le Nobel, Kourouma le Renaudot... Oui, la littérature africaine commence à intéresser le reste du monde... Même si deux hirondelles ne font pas le printemps!» Si le festival du Livre de Saint-Malo, Etonnants Voyageurs, a choisi de monter sa quatrième «filiale» au Mali (après Missoula, Sarajevo et Dublin), c'est pour accompagner ceÊprintemps de la littérature africaine. Un printemps héroïque, sur un continent illettré à 80 %, où les livres continuent à être un luxe inabordable (140F, alors qu'un haut fonctionnaire en gagne 1000 par mois), où l'édition est un casse-tête. Mais l'énergie de la jeune scène a séduit Michel Le Bris, le président de la manifestation malouine, lors d'un passage au Centre culturel français de Bamako l'an dernier: «Il y avait des étudiants, des cercles de poètes de l'université, des bibliothécaires, des femmes qui apostrophaient des vieux musulmans: "Et le combat contre l'excision, vous ne faites rien?" Il y avait une telle allégresse, une telle simplicité... J'en suis sorti convaincu que rassembler ici les écrivains africains avait un tout autre sens que les rassembler en France. Le Centre culturel français s'offrait à organiser le festival, mais je n'avais pas envie de fonctionner comme ça, je voulais que très