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Libération

55 minutes.

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publié le 7 mars 2001 à 23h54

Du soleil pour les gueux est un objet dont la bizarrerie s'exprime par tous les plans. Mais le film a ceci de supplémentairement curieux qu'il (ne) dure (que) 55 minutes. La question de la durée au cinéma est des plus passionnantes et peut former un terrain propice à la réflexion théorique, même si ses implications sont également, et plus fatalement, économiques : pas facile de sortir aujourd'hui un film dont le format ne correspond ni aux standards industriels (entre 1 h 30 et 2 h) ni aux grands débordements que s'accorde parfois cette même industrie (au-delà de 2 h, parfois 3 h, façon Titanic, mais jamais beaucoup plus).

Le format moyen-court, auquel appartient le film d'Alain Guiraudie, n'a aucune existence officielle, le Centre national du cinéma ne reconnaissant que les courts et les longs métrages. C'est pourtant ce format qui rencontre les faveurs de plus en plus assidues de tout un pan du jeune cinéma français. Parmi ses éclaireurs actuels, il y a bien sûr les frères Larrieu, dont la Brèche de Roland a fourni un étalon récent à la profession. Comme le metteur en scène du Soleil pour les gueux, les Larrieu n'utilisent pas ce format par défaut mais par choix : ils sont revenus à ce sentier après avoir fréquenté les autoroutes du long métrage «normal». L'intéressant est aussi que, dans presque chaque cas, un format inhabituel semble favoriser un cinéma expérimental, libre et inventif. Peut-être parce que, conscient de s'inscrire contre un système qui n'a pour eux prévu a