Plongée dans une lumière rouge, la salle Wagram prend des airs de lupanar. La bande-son, haletante, entonne Je t'aime, moi non plus et des cocottes intello exhibent leurs charmes en soutien-gorge sur chemise, robes nuisettes-trench ou bustiers-corsets biscornus. Ce sont les filles de Madame Rei. Nous sommes chez Comme des garçons et la créatrice japonaise livre sa vision quelque peu torturée du désir. Les vestes s'entaillent de découpes en dentelle, les pantalons se fendent à l'entre-jambe. Quand d'autres se livrent à des décolletés plongeants sur peaux luisantes, Rei Kawakubo préfère les décou pes crues et les vêtements blessés comme rescapés d'une petite sauterie SM. Pas de chichis sexy, les tenues sont hard. Pleine d'ironie, la collection de madame Rei répond à la sexualité débridée soufflant depuis quelques saisons sur la mode.
Plus épanouie, l'élégance sens dessus dessous de l'Allemand Lutz relève du libertinage malin. En boutonnant un carré de mousseline sur une écharpe de laine, il invente une étole. Ses bombers blancs, dotés d'un col tailleur, se prennent à ressembler à des spencers et ses jupes droites, au pli repassé, fendues sur le devant, ont de faux airs de bermudas. Accouplant les pièces de la garde-robe, cet ancien assistant de Martin Margiela prend un malin plaisir à tout faire à l'envers. Il développe une logique de l'absurde pleine de poésie. Jetés en vrac sur la silhouette, ses vêtements, un brin rigoristes, gagnent en nonchalance sexy.
Aride. Autre Allemand