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Libération
Critique

La cruauté fait les «Trois-Huit»

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publié le 14 mars 2001 à 0h01

Longtemps, le cinéma français ne s'intéressait qu'à la petite-bourgeoisie. Aujourd'hui, c'est au tour de l'OS. Pourtant, malgré ce contexte prolo devenu monnaie courante, Trois-Huit, le nouveau film de Philippe Le Guay (les Deux Fragonard, l'Année Juliette) s'intéresse assez peu au discours de classe et aux mécanismes d'oppression propres à l'entreprise. Bien au contraire, il décrit une situation d'abus de pouvoir qui échappe entièrement à la configuration hiérarchique.

Bizutage. Pierre (Gérald Laroche) est un père de famille autour de la quarantaine. Son épouse réussit mieux sa vie professionnelle que lui. Tandis qu'elle accumule les promotions, il se fait engager dans une fabrique de bouteilles pour faire les trois-huit. Là, il rencontre Fred (Marc Barbé), beau mec ténébreux qui d'emblée lui cherche des noises dans les vestiaires. Au fil des semaines, le bizutage un peu lourd vire au harcèlement mental et Pierre se retrouve absolument démuni. Le Guay s'échappe donc des sentiers adultes du film politique (où les rapports de domination sont affaire de position sociale) pour s'enfoncer dans la jungle barbare des pulsions enfantines. Ce lieu archaïque où le partage entre faibles et forts échappe entièrement au contrôle des institutions. Assez proche de la Meilleure façon de marcher de Claude Miller, la première partie de Trois-Huit ennuie un peu. Sa dramaturgie est sommairement binaire. Fred la brute perverse souffle le chaud et le froid, humilie violemment Pierre devant leurs