Jeon Jeong-Min raconte qu'à 13 ans, sa mère l'a emmenée voir la devineresse du quartier. Une «femme possédée, dit-elle, qui lui fait alors la prédiction suivante: «Tu mourras jeune... à moins de consacrer ta vie au plaisir des autres.» Sa mère, qui ne veut pas en faire une courtisane, conduit la jeune fille à Pak Ch'o-wol, le maître de P'ansori. En ce début des années 60, la petite possède déjà la voix caractéristique de ces «chanteurs d'histoires» coréens. Le sort en est jeté: Jeon Jeong-Min quittera sa région de Corée du Sud pour étudier à Séoul, et elle sera kwangdae, chanteuse de P'ansori. Elle se produit cette nuit pour la première fois à Paris.
OEuvre de huit heures. Opéra populaire traditionnel, le P'ansori n'est guère connu en Europe que par les films de Im Kwon t'aek, la Chanteuse de P'ansori (1993) et le Chant de la fidèle Chunhyang, présenté en 2000 au Festival de Cannes. Le terme d'opéra est légèrement impropre, s'agissant ici d'un long récit chanté et mimé par une seule personne, acteur et narrateur à la fois, assis ou debout sur une natte, un éventail à la main et accompagné d'un homme au tambour (puk) qui, parfois, donne aussi de la voix, ponctue la longue narration. Cet «opéra solo» à plusieurs personnages peut durer jusqu'à huit heures, avec sept grands rythmes principaux, du plus calme au plus furieux, entrecoupés de récitatifs et d'improvisations.
Il ne reste trace que de cinq chants de P'ansori sur la douzaine qui ont été écrits au
XVIIIe siècle, période où