envoyée spéciale à Rouen
«Les metteurs en scène doivent s'appliquer à mettre au point une déambulation qui ne sera pas laissée au hasard: les Bonnes et Madame se rendent d'un point à un autre de la scène, en dessinant une géométrie qui ait un sens. (...) Elle s'inscrira comme, dit-on, dans le vol des oiseaux, s'inscrivent les présages, dans le vol des abeilles une activité de vie, dans la démarche de certains poètes une activité de mort.» Cette note, introduite par Jean Genet au premier tiers des Bonnes, confirme l'intuition de Yoshi Oïda qui aborde la langue du poète par la chorégraphie. Le metteur en scène et acteur japonais (qui tint un rôle dans la création nippone du Balcon en 1967, avant de devenir l'un des interprètes fétiches de Peter Brook) retient du théâtre de Genet sa valeur rituelle, qui rejoint les traditions orientales du nô et du kabuki.
Ici, la géométrie voulue par l'auteur s'apparente à une danse de mort universelle, où chaque interprète Ismaël Ivo (afro-brésilien), Koffi Kôkô (Béninois) et Ziya Azazi (Tturc) intègre une dimension de son héritage traditionnel. Cette distribution, magnifique, entièrement masculine, renvoie à la fois aux critères du théâtre antique et à l'univers homosexuel de l'auteur, ainsi qu'au thème du travestissement qui traverse toute son oeuvre. Peu importe que le dramaturge se soit inspiré du crime des soeurs Papin, tout dans les Bonnes exhale la transe sacrificielle. A travers le mouvement et la transformation des corps, Yoshi Oïd