(envoyé spécial à Berlin)
Deux mannequins parfaitement inertes gisent au pied d'un petit rideau rouge. On jurerait des poupées de chiffon, mais le spectacle commence et ils prennent vie. Toute la mise en scène de Thomas Ostermeier pour la Mort de Danton de Büchner s'inspire du théâtre de marionnettes. La scène est sur plusieurs niveaux et remplie de trappes; entrées et sorties se font par dessous aussi bien que par les côtés ou par derrière. Dans ce dispositif, conçu par le scénographe Jan Pappelbaum, les aires de jeu sont nombreuses mais peu propices aux grands déplacements. L'air et l'espace semblent comptés à des personnages réduits à l'état de pantins ou d'ombres.
On avait quitté Ostermeier en hyperréaliste trash, adaptant sans concession une pièce de l'Anglais Mark Ravenhil au titre explicite, Shopping & Fucking («les Courses et la baise»). Les spectateurs d'Avignon 1999 n'ont pas oublié la sanguinolente scène de sodomie au poignard qui ponctuait le spectacle. Ils avaient surtout découvert, au travers de trois pièces, un grand perturbateur de la scène berlinoise, animateur de la Baracke, installée à l'ombre du Deutsches Theater. Depuis, Ostermeier, qui fête ses 33 ans cette année, a fait du chemin. En janvier 2000, il a pris la direction avec la chorégraphe Sacha Waltz (lire ci-dessus) de la très prestigieuse Schaubühne. Et la pièce de Büchner (qui sera reprise cet été à Avignon) représente sa première incursion dans le répertoire classique, puisqu'il n'était, jusque-là,