Joaquim Paiva, 54 ans, est un collectionneur réputé de photographies contemporaines brésiliennes. Il en possède près de 1 800, dont un ensemble de 400 portraits masculins signés Alair Gomes. Il est venu à Paris parler de celui qu'il a rencontré pour la première fois à Rio de Janeiro en 1978: «Alair avait alors 58 ans, il avait déjà fait beaucoup de photographies, mais seul un petit cercle d'intimes connaissait son travail.»
Pourquoi son travail était-il confidentiel?
A la fin des années 70, nous vivions en plein régime politique militaire. Un photographe comme Alair avait pleinement conscience des limites de diffusion, et, à ma connaissance, il n'en a pas souffert. Maintenant, notre pays a mûri, on vit une phase de liberté créative.
Son côté obsessionnel vous a-t-il choqué?
On dit qu'il est voyeur; et alors? Comme tous les photographes. Moi, je le vois comme quelqu'un qui aime à regarder les objets de sa passion: des jeunes gens dans la plénitude de leur jeunesse. Comme il ne photographiait que des garçons, beaucoup ont pensé : «Ah non, ce n'est pas de la photographie, ça n'a aucune valeur, c'est de la pornographie gay»...
A quelle famille le rattacher? Mapplethorpe?
Pas du tout. Mapplethorpe révèle beaucoup de culpabilité. C'est une photographie pleine de souffrance, presque une autoflagellation. Il montre le côté sombre, morbide, maladif, de la sexualité qu'est le sadomasochisme. Gomes fait une photographie lumineuse, où ce qui importe est la légèreté. Bien sûr, il y a aussi une