C'est un archipel aux apparences trompeuses. Celui d'un célèbre anticyclone, de villages somnolents blanchis à la chaux, d'églises coloniales, de grasses prairies découpées par les currais (murets de pierre) et d'attelages transportant des bidons de lait. Bref, il est tentant, en débarquant aux Açores, de s'en tenir aux apparences: une constellation d'îles flottant paresseusement au milieu de l'Atlantique, à 1 400 kilomètres des côtes portugaises. On peut aussi envisager cet archipel comme un ultime Eden de l'Union européenne, un territoire replié dans un splendide isolement, sans panneau publicitaire ni fumée d'usine, où les maigres indications et noms de rue figurent sur des azulejos.
Tout cela est vrai, mais pas suffisant. Les Açoréens sauront vous mettre en garde: partout, à l'exception de Santa Maria, le terrain est volcanique et, d'éruptions en séismes, ces bouts de croûte terrestre jaillis des eaux ne se priveront pas de vous rappeler à l'ordre. Et de vous réserver quelques surprises, à commencer par la flore: des plantations d'ananas, de thé, de platanes, des nuées d'hortensias et d'azalées se mêlent aux conifères, aux araucarias, aux rhododendrons et au lichen. D'où, aussi, ce vertige: Açores nonchalantes d'un Portugal suranné et comme figé dans le souvenir d'une grandeur déchue; et puis Açores, essaim de neuf îles agitées et fragiles. Ephémères, disent même certains.
Visages impénétrables. D'entrée, l'île de Saõ Miguel, la plus grande de l'archipel, donne le ton: un