Le 54e festival de Cannes ne lèvera le rideau que ce soir avec le Moulin Rouge de Baz Luhrmann, mais les hostilités semblent avoir déjà commencé. Cette fois, la polémique précède la compétition au lieu de succéder au palmarès, ainsi que les rites locaux de la tribu du cinéma en avaient établi l'usage. Le corps du délit est celui d'Amélie Poulain, héroïne réputée si gentille, qui semble pourtant froncer son gros sourcil au-dessus de la Croisette encore endormie et fait peser sur le nouveau sélectionneur en chef, le délégué artistique Thierry Frémaux, l'oeil du remords inquisiteur façon Abel toisant Caïn.
Gros succès. L'objet de ce délit, voire ce crime comme on aimerait nous le faire croire, c'est de n'avoir pas sélectionné un film jugé irrésistible, qui a déjà rassemblé près de 2 millions de spectateurs en deux semaines d'exploitation et semble bien parti pour rejoindre rapidement le club des gros succès qui ont emballé le box-office hexagonal de cette exceptionnelle année 2001 (après le Pacte des loups, la Vérité 2, le Placard, Yamakasi...). A ce rythme, ce seront au moins quatre, peut-être cinq millions de fans que l'Amélie de Jean-Pierre Jeunet pourrait conquérir en fin de carrière, sans compter l'export, où ce nouveau reflet de la french touch promet de faire des ravages (tous les territoires commerciaux les plus importants l'ont déjà acquis). Cette concomitance du succès avec les ultimes préparatifs d'ouverture du festival de Cannes a suffi pour faire tilter les neurones