Faudrait parler de quelque chose. Mais de quoi? Neuf heures qu'ils sont plantés là, Marc et Gérard, à filtrer les entrées de la plage privée, au bout de la Croisette.
« Et pour les ports d'armes, tu fais comment, toi?
Quand tu travailles pour les Saoudiens, ils demandent eux-mêmes ton autorisation à la préfecture. C'est des milliardaires. Ils livrent le pétrole à la France: t'imagines qu'on leur donne tout ce qui faut.»
Autour, tout cogne. Fort. Les basses de la sono du festival. Le soleil dans un ciel blanc. Et ce «pognon qui sort de partout», sur le ponton de la plage privée. La femme et les gosses de Marc sont sur celles d'à côté, la municipale. Ça leur paye les vacances à Cannes, ce contrat de vigile. Marc est convoyeur de fonds dans le Jura. Il a eu un piston, son beau-frère. «C'est pas Piccoli, là-bas?», demande-t-il. Il a la trouille depuis qu'il a refoulé un acteur américain qu'il n'avait pas reconnu.
«Pour le relationnel». «Pour le festival, on reçoit des CV de toute la France. Certains le feraient gratuitement pour le prestige», explique un des responsables de l'agence Diam's, une des plus importantes de la côte, qui passe de 60 à 200 personnes durant le festival. Dans le palais et 500 mètres autour, il y a plus de 1 000 paires de lunettes et costards noirs, portant talkie-walkie. Une population en soi. Omniprésente et hypervisible. «C'est le principe de faire sentir aux gens qu'ils sont sous contrôle», récite un maître-chien. Encore trois heures à tenir. Gérard, en