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Au contraire.

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Jean-Luc Godard -réalisateur d'«Eloge de l'amour».
publié le 16 mai 2001 à 0h53

Dans une saynète du film que Pierre Carles a consacré à Pierre Bourdieu (La sociologie est un sport de combat), on voit un coursier livrer un pli dans le bureau de Bourdieu au Collège de France. Bourdieu déchire l'enveloppe et commence à regarder la photo et à lire le texte que Godard lui a fait parvenir. «Bon alors?... tatatatata... (pause) Avec Godard, c'est toujours un peu compliqué... tatatata... (pause, silence)» Et de conclure en regardant, rieur, la caméra: «Je n'ai rien compris», avant d'ajouter, comble de la classe faite intellectuel: «Mais je ne suis pas poète.» La poésie justement. A la fin des années 80, Sheila chantait: «La vie, c'est comme un film de Godard, un jour, c'est blanc, un jour, c'est noir; et c'est comme ça...» Carambolage: Jean-Luc Godard serait-il à mi-chemin entre l'incompréhension fraternelle de Bourdieu et l'hommage poétique de Sheila?

Vieux souvenir. A Venise en 1984, au temps de Prénom Carmen, au restaurant de l'hôtel Excelsior. Tandis que des critiques inconditionnels soliloquent dans l'hommage, Godard leur lit au visage France-Soir. Puis s'adressant à un critique nettement moins acquis: «Vous, je crois que vous n'aimez pas trop ce que je fais?» Godard va plutôt à ce qui ne lui ressemble pas.

Vieille question. A Cannes, en 1990, à la conférence de presse de Nouvelle Vague. La rédactrice en chef d'un magazine de cinéma l'interpelle: «Jusqu'ici, je suivais, mais là je dois vous dire que je suis larguée.» Godard aime bien la contradiction. La jour