Fatigue du matériel, protestation des machines? Le festivalier commence à se plaindre de récurrents dérapages techniques en pleine projection. Comme cette coupure de vingt minutes qui endigua le flux doux-amer du Singe, troisième film attendu du Kirghiz Atkan Abdykalykov. Attentat esthétique et vraie guigne pour un film qui, au contraire, réclame l'hypnose.
Pour Abdykalykov, faire du cinéma est un enjeu tout à la fois de peintre et de mage. Ses trois films constituent une suite d'autoportraits, dépeignant l'adolescent qu'il fut, regardant ses 17 ans dans un miroir fêlé, avec une idée de ce que ce voyage à rebours doit avoir d'introspectif; une chronique par petites touches nostalgiques et mineures, abordable et pourtant totalement étrange.
Le jeune garçon de 17 ans que ses amis appellent le «singe» en raison de son profil simiesque et de son caractère peu épanoui, a toutes les chances d'être Abdykalykov lui-même, de même que cette adolescence entre concours de virilité avec les copains et frousse bleue des filles paraît bien être la sienne.
Beau, ce troisième film ne réédite pas le choc ressenti devant le Fils adoptif, ovni découvert il y a trois ans. Le cinéma d'Abdykalykov s'est adouci, il rappelle aujourd'hui un moment précis de l'après-néo-réalisme en Italie, Mamma Roma de Pasolini, la Commare secca de Bertolucci, partageant avec eux un arrière-goût nostalgique des terrains vagues, des prostituées qui impressionnent quand on a 17 ans. Additionnés les uns aux autres, ces mom