Léon envoyé spécial
C'est un endroit qui fait tourner la tête. Il assèche parfois l'encre des poètes. Les célébrités s'y croient anonymes et les bateliers qui l'empruntent n'y voient jamais la même chose. Le «courant de Huchet» est ainsi. Planté dans les Landes, c'est un lieu bruissant d'histoires et de légendes qui se multiplient autant que les poules d'eau dérangées par les barques. Une étendue apaisante, qui, en s'écoulant vers la mer, forme un delta de 656 hectares et s'allonge sur 8 kilomètres. Pour en prendre la mesure, il faut embarquer sur un petit bateau plat. Glisser au fil de l'eau. Ecouter son clapotis. Se laisser porter par le babil des bateliers, arriver à ne plus distinguer le vrai du faux.
Pour le descendre, il faut passer par le bureau des rameurs. Une affiche d'avant-guerre y vend, dans une écriture désuète, le calme reposant d'un «cadre unique en France». Une véritable forêt vierge avec ses «fougères géantes, ses Hibiscus roseus, ses cyprès chauves aux racines ressortant de terre en véritables statuettes». Les brochures d'aujourd'hui ne racontent pas moins que la «découverte de l'Amazonie landaise». En fait, tout cela est un peu vrai. Mais on ne peut pas avoir toutes ces beautés au même moment. Il faudrait pouvoir revenir chaque semaine. En mai, il ne fait pas beau et, pourtant, déjà des gens s'y pressent. Parfois, il y a jusqu'à 27 bateaux qui descendent le courant, 6 voyageurs par barque, sur de petits sièges agrémentés de coussins colorés.
Manier le palot.