envoyé spécial à Vienne
C'était le 11 mai dernier au Wiener Konzerthaus. Dix minutes d'ovation pour le ténor de l'avant-garde européenne des années 60. Mais aussi pour Pierre-Laurent Aimard, que György Ligeti a choisi pour créer et enregistrer nombre de ses oeuvres, dont cette Etude n°18 intitulée Canon, donnée à Vienne en première mondiale.
Banda Linda. Ils se comptent sur les doigts d'une main, les pianistes capables aujourd'hui de donner l'intégrale des Etu des de Ligeti en concert. Ecarts dynamiques spectaculaires, rythmes composés à deux mains, obligent les interprètes à une remise en question to tale de leurs habitudes. C'est la révélation d'un monde rythmique inédit (celui des Banda Linda de Centrafrique, par un élève du conservatoire de Ham bourg) qui a conduit Ligeti à entamer en 1985 ce monument de la littérature pianistique du XXe siècle. «Je connaissais les folklores d'Amérique latine, et la musique d'Afri que du Nord, confie-t-il. La musique bulgare ou turque comporte certes des mesures asymétriques, mais ce n'est qu'au sud du Sahara que j'ai entendu des musiciens diviser 12 non pas en 2, 3 ou 4, mais en 5 et 7.»
Certains purent en juger dès les années 60, via un disque publié par Simha Aron au CNRI (laboratoire des cultu res et traditions orales du CNRS). Le talent de Ligeti aura consisté à ne pas intégrer ces rythmes et ce système métri que à son langage comme un folklore, mais à laisser sa pensée musicale se transformer à leur contact, traduisant sur un instrume