Que venaient-ils faire début juillet en plein coeur de l'Espagne touristique? La même chose que l'avant-veille en Norvège, ou la semaine d'après en Australie: se présenter en jouant sur scène des titres résolument rock que beaucoup envisagent déjà comme de futurs classiques. Au coeur de la nuit, The Strokes embrasent ainsi le chapiteau de l'ingénieux petit festival Isladencanta.
Sur l'île de Majorque, autour de la piscine d'un hôtel, une bande de jeunes Américains s'ébroue. Un des garçons plonge tout habillé dans le bassin. Deux autres se relaient sur un scooter. Un quatrième, le bras plâtré, en est réduit à deviser avec divers comparses aux attributions plus ou moins définies. Il y a aussi quelques filles dans les parages, la soeurette du guitariste, affalée sur un transat en compagnie d'une copine non moins accorte. Tous ont encore l'âge de l'insouciance et les sollicitations demeurent suffisamment limitées pour qu'ils y répondent d'une manière affable et désinvolte. Cela ne durera sans doute pas. «Parfois, on ressent une énorme pression, parfois non, selon l'humeur.»
Lucidité. Une impression prédomine cependant: les cinq musiciens de The Strokes ont la tête sur les épaules, pourvu qu'ils associent le geste à la parole. «Bien des groupes ont cru qu'avec le succès, ils pouvaient lever le pied, se défoncer et sauter des tas de nanas. Nous avons conscience du danger et entendons ne pas céder à la facilité, en gardant présent à l'esprit le fait qu'il nous reste tout à prouver.»