Mexico envoyé spécial
«Pour les Mexicains, la mémoire n'a aucune importance. Les archives de la nation pourrissent, elles sont pleines de champignons, on veut les déplacer sans arrêt. Quand elles ne sont pas purement et simplement détruites.» Installée à Mexico depuis 1978, Sibylle Hayem, ingénieure du son française, a consacré ses travaux aux traditions mexicaines. Et de rappeler une curieuse manie, née au temps des Aztèques qui, tous les cinquante-deux ans, lors de la traditionnelle fête du Nouveau Feu, saccageaient leurs pyramides et leurs biens. Les colonisateurs espagnols détruisirent à leur tour le codex préhispanique.
Cette «tradition» de la destruction a traversé les siècles. Et si les archives ont été sauvegardées, c'est grâce aux soins d'individus isolés. Sibylle Hayem est de cette espèce, plutôt rare au Mexique. Son dernier combat remonte à quelques mois: sauver 35 000 bobines de films d'une destruction réclamée par la direction de la Cinémathèque, sous prétexte d'un règlement absurde.
A la poubelle. Janvier 2000: la nouvelle directrice de la Cinémathèque de Mexico, Luz Fernandez de Alba, décide que l'institution doit disposer d'une collection permanente de 200 films, pas un de plus, pas un de moins. Or, pendant de nombreuses années, des réalisateurs, des producteurs et les services culturels des ambassades en place au Mexique avaient fait don à la Cinémathèque de milliers de films. Hélas, ils sont entrés dans les archives sans que l'administration de la Cinémathèque