«Baise-moi», la manière la plus frontale de dire «Aime-moi» après le punk. Pour son âpreté et son refus de l'hypocrisie, le film de Coralie Trinh Thi et Virginie Despentes a été banni. D'abord interdit aux moins de 16 ans (par visa du ministère de la Culture), il a été enlevé de l'affiche le 30 juin 2000, deux jours après sa sortie. Le Conseil d'Etat, saisi par une association proche de l'extrême droite, lui ayant retiré son visa d'exploitation, mais accordé le statut de film X, ce qui interdisait toute sortie en salles. Début juillet 2000, Catherine Tasca, ministre de la Culture, promettait de trouver un consensus, en revenant à une interdiction aux moins de 18 ans distincte du classement X. Il a fallu attendre quatorze mois la mise en place de ce décret. Dès janvier dernier, Baise-moi était disponible à la location en vidéoclub, mais restait privé de sortie en salles, de visa. Interdit aux moins de 18 ans mais non «ixé», il peut ressortir aujourd'hui sur une trentaine d'écrans français. Virginie Despentes et Coralie Trinh Thi reviennent sur cette année aux enfers.
Les parias
Virginie Despentes: Notre silence délibéré sitôt l'affaire déclenchée n'a choqué personne. Tout le monde s'est mis à parler à notre place, au grand soulagement de chacun.
Coralie Trinh Thi: Ce que nous avions à dire intéressait moins les médias et les politiques que leurs propres théories. Nous sortions du tournage et du montage dans un tel état d'épuisement que nous ne nous sentions pas en état de livrer