envoyé spécial à Deauville
Contrairement aux apparences, la manifestation qui a lieu à Deauville chaque fin d'été n'est pas un festival mais une représentation. Ici, on met en scène la plus dévorante des mythologies contemporaines: le cinéma américain. Une mythologie mondiale, qui déploie au-dessus des sociétés modernes une constellation de valeurs, de héros, de dieux et demi-dieux.
Puissance. Ce triomphe sécrète pourtant son propre poison: une inquiétante obésité. Réalisant plus de la moitié de ses bénéfices hors des Etats-Unis, l'ogre hollywoodien est prisonnier d'une globalisation qu'il a lui-même voulue écrasante. Condamné aux formats king size, le cinéma industriel gagne en puissance de feu ce qu'il perd en subtilité: des scénarios toujours plus sommaires et manichéens, dont les vides sont masqués tantôt par une technologie superlative, tantôt par un star-system toujours plus olympien, dans lequel les personnages ont définitivement disparu au profit des acteurs. Ainsi, dans Swordfish (Opération Espadon), ce n'est jamais le prétendu cybertruand Gabriel qui nous embrouille et manipule, mais bel et bien l'archangélique Travolta, hyperconscient de cette visitation, qui descend sur le film dans un mouvement, un style et un amour de soi identiques à ceux qu'il déploie à chacune de ses apparitions.
Réalisé par Dominic Sena, mais surtout produit par Joel Silver, Swordfish (sortie en France le 12 septembre) est par ailleurs un correct thriller techno, aussi efficace que fumeux, qui