Selon nos informations, Kelly Joyce n'a pas de lien de parenté connu avec James, l'écrivain irlandais du même nom. Mais force est de constater, à l'écoute de Vivre la vie, joli carton postal prépubère entre Viktor Laszlo («Changer l'eau des fleurs») et Elton John (Song for Guy, vieille B.O. publicitaire) que la jeune artiste présente de sérieuses dispositions à l'exploration de nouvelles terres langagières. Kelly invente en effet un pays merveilleux où l'on peut vivre et chanter sans frottement, où le bout de la langue ne se heurte plus à l'épée rouillée d'académiciens séniles. Bref, un pays d'où le procès-verbal serait banni, où les liaisons ne seraient plus dangereuses.
Kelly raconte qu'elle est «venue d'un pays si loin» et que, tout de suite, elle a «plongé [s] on regard dans le tien». La raison de ce plongeon dans ton regard est la suivante : tu es «so tender». Jusque-là, rien de très transgressif au niveau de la langue. Depuis que Dieu nous a donné la «foy», via Ophélie Winter, il y a longtemps que Jean Dutourd a renoncé à se faire du «soucy». Le trésor lexical caché de Vivre la vie n'est donc pas à chercher du côté de cette vieille tendance française R & B à angliciser les prononciations. A l'abord du refrain, tout coule merveilleusement. Ça chaloupe comme le Canoë rose de Viktor Laszlo à la surface de ton lac intérieur : «Vivre la vie sans un amour/fuyant la lumière du jour...» Tu ne comprends rien, mais tu comprends quand même, tellement tu es «so tender». C'est juste