«Tu peux enlever tes lunettes...», intime doucement Pablo Escobar à l'Amerigano Johnny Depp. C'est un trait de lumière. Bien sûr: trop de Ray-Ban.
Blow n'est pourtant pas si tape-à-l'oeil. D'abord, il y a un film dans le film, surprenant l'attention, voire l'émotion. C'est ce qu'on pourrait appeler «le jardin du bon Dieu». De taule, le narrateur rangé des shiloms (Depp en perpète bedonnant) se rappelle son père, digne du «héros au sourire si doux» hugolien. Blow, là, se détourne à point de son propos, l'âge d'or 70 du trafic de drogue aux USA, pour se recentrer sur son sujet secret: papa.
A contre-emploi en cravate de brave type, Ray Liotta, habitué grêlé des numéros de fumiers épileptoïdes, fait un surmoi mou idéal jusqu'à picoter les yeux complaisants. «Donne-lui tout de même à boire, dit mon père.» Dans ces scènes humaines, où l'image les apparie, Depp est bien face à Liotta. Son timbre, une lassitude lui tenant lieu de tragique, l'étoffent tel le tweed épaulant un père que Johnny apprend à jouer à l'écran comme à la ville.
Réduit autrement à lui-même, l'acteur reste, dans sa composition du pionnier dealer George Jung, ce qu'il est: un peu juste. On l'aime bien (en France), jamais trop convaincu qu'il n'est pas légèrement bidon au fond. Européen, «rocker de salon» selon Nicolas Sellem de la revue Cinéastes, arty tant qu'on veut, depuis le temps que laisse John Christopher Depp III, 38 ans et presque autant de films? Ed Wood, Edward, Thompson, Kerouac, Donnie Brasco?
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