Anneau d'or corsaire à l'oreille et muscles sous panoplie de cuir noir: ainsi paraît Bernard Lavilliers dans un bar de la rue Oberkampf, son nouveau quartier de prédilection parisien. A la ville comme à la scène, Lavilliers fond sa caricature de baroudeur solitaire et insomniaque dans une image hétéroflexible. Mais une fois passées les frontières du ridicule surgissent les fêlures d'un auteur-performer dont les chansons métissées suivent depuis trente ans la route de Christophe Colomb, entre Amérique du Sud et Jamaïque.
Depuis son premier voyage au Brésil en 1965, Bernard Lavilliers a exploré la bossa-nova, la salsa, le rock et le reggae, associés à un verbe assumant plutôt bien l'héritage de Ferré, Kipling et Cendrars.
«L'or des fous». En partie écrit dans le nord du Brésil, son seizième album, Arrêt sur image, reflète un état de contemplation amoureuse vécu ces deux dernières années. Métaphore à l'appui: «Un ami brésilien m'a raconté l'histoire de "l'or des fous". C'est un minerai, la pyrite de fer, dont la troublante ressemblance avec l'or a provoqué des luttes sanglantes entre chercheurs. Transposé dans ma propre vie, l'amour pourrait être cet or-là.»
Le chanteur clôt ses douze titres saisonniers en reprenant l'une des chansons françaises ayant probablement le plus parcouru le monde. Sous un habillage jazz-latin, les Feuilles mortes (Autumn Leaves) se fondent dans un catalogue de rythmes cap-verdiens, bossa, reggae, rock ou techno, qui abritent un nouveau succès de saison.