Dunkerque envoyée spéciale
Murs noirs, lumières orange. «Wouou ououon. Klong. Shhhhhhh»: c'est la musique industrielle de Sollac, son aciérie, ses ponts roulants, ses hauts-fourneaux, son laminoir. «Plong, plong, plong.» On pose le pied sur la mezzanine ajourée, tel un pont suspendu au-dessus d'une rivière de métal rouge. La chaleur saisit par vagues, comme si le sirocco soufflait d'en bas. Dans les narines, le parfum piquant de la poussière d'acier. Le souffle coupé, l'explorateur contemple le vide. Tout en bas, le laminoir à chaud ressemble à un jouet. Vertige jubilatoire. Ici, signale notre guide, «Notre-Dame de Paris tiendrait debout». On lève la tête en retenant son casque qui menace de choir pour contempler le pont roulant, monstrueux, rugissant, suspendu à une forêt de lianes. La machine agrippe une plaque d'acier, puis la laisse tomber dans un bruit de tonnerre au-dessus d'une benne noire. Nef immense, bruyante, d'acier et de feu, Notre-Dame des Hauts-Fourneaux est sans miséricorde.
Classement Seveso. Accroché sur le port, pour recevoir directement le minerai des bateaux, Sollac a poussé sur les dunes, gagné sur la mer, près de Mardyck, un village de pêcheurs. Blotti derrière une haie de peupliers, le hameau feint d'oublier qu'il campe à côté d'une raffinerie, d'une aciérie et d'une usine pétrochimique, toutes classées Seveso. Dans le pays, 60 000 personnes vivent de la manne du géant de l'acier. Pierre Salomé, responsable de l'accueil chez Sollac-Atlantique, s'emploie