De la truculence de la production, signée David Hockney pour Glyndebourne, au minimalisme californien de Peter Sellars (qui avait replacé l'action dans une prison éclairée au néon), The Rake's Progress défie les metteurs en scène, depuis sa création à la Fenice de Venise en 1951. Difficile de restituer le zapping stylistique de la partition, postmoderne avant la lettre, avec sa façon de renouer avec le récitatif mozartien, mais également avec les tours baroques de Haendel et Rossini ou le romantisme de Glück. Car The Rake's Progress, généralement sous-titré «la Carrière d'un débauché», est un chef-d'oeuvre dans lequel Stravinski dépasse l'apparente logique du pastiche, en la coulant dans une structure rigoureuse et en l'étendant à ses propres trouvailles orchestrales.
Couleurs. On a déjà loué ici les mérites des productions d'André Engel, qui sait donner à voir la dramaturgie la plus forte et la plus limpide, dans des décors et des lumières de rêve, respectivement signés depuis des années par Nicky Rieti et André Diot. On n'a pas oublié sa Lady Macbeth de Mzensk, de Chostakovitch, sur un champ de choux incliné, à Bastille, son Don Giovanni pasolinien pour le Grand Théâtre de Bordeaux, sa Petite Renarde rusée de Janacek revisitée Tim Burton pour l'Opéra de Lyon, et son K... hitchcockien, encore pour Bastille. Il a choisi ici de transposer la grinçante comédie faustienne de Stravinski dans le Broadway des années 50.
Dès la première scène, qui voit Tom Rakewell et sa fiancée Anne