Constatant «l'appétit culturel» des Français pour leur patrimoine, la ministre de la Culture estime que l'Etat doit apporter son soutien financier pour le préserver et garder son rôle d'arbitre.
Depuis une dizaine d'années, on assiste en France à une «obsession patrimoniale». A quoi attribuez-vous cet emballement?
L'évolution actuelle donne l'impression d'une accélération du temps vécu. D'où ce sentiment que le fleuve passe sans laisser beaucoup de traces. Dans ce paysage en constant mouvement, nos contemporains éprouvent sans doute un besoin de repères: les éléments du patrimoine, et en particulier du patrimoine bâti, en sont, de même que la mémoire collective ouvrière, les traditions populaires...
La fin d'un siècle polarise aussi la réflexion collective des peuples. L'emphase autour du passage à l'an 2000 a conforté ce sentiment d'un point final à un siècle marqué par des événements hors du commun, en particulier la Shoah. Le 11 septembre restera, quant à lui, un catalyseur de l'interrogation sur les identités et les rapports entre les civilisations. Chaque société, qu'elle ait un grand ou un petit territoire, va être très attentive à la préservation des traces de son histoire collective et de sa mémoire.
La construction européenne n'a-t-elle pas accentué cette passion?
Les peurs sécrétées par la mondialisation n'ont pu que ren forcer cet attachement au pa trimoine. Il y a parfois une espèce de vertige devant l'espace occupé par la conservation, la mise en réserve de la mémoir